Anachroniques

26/03/2017

Au plaisir perché de deux romans devenus des classiques

Calvino Italo, Le Baron perché, traduit de l’italien par Juliette Bertrand, revue par Mario Fusco, notes et carnet de lecture par Nathalie Rivière, Gallimard jeunesse collection folio junior, 2016, 373 p. 8€20
« Il se passait avec le personnage quelque chose d’insolite :
 je le prenais au sérieux, je m’identifiais à lui »
Italo Calvino
Après une épopée, où l’intérêt pécuniaire de l’agent et des ayant droits a fait s’absenter des librairies les œuvres de Calvino, jusque là traduites au Seuil, Gallimard en est devenu l’éditeur (1). Voulant mettre rapidement sur le marché une œuvre majeure de l’auteur italien, l’édition en folio junior reprend telle quelle la traduction des éditions du Seuil. Le Baron perché appartient à une trilogie, Nos ancêtres comprenant : Le Vicomte suspendu (1952), Le Baron perché (1957), Le Chevalier inexistant (1959), où s’expriment, le mieux, les dons de fabuliste et la verve de conteur de Calvino (1923-1985), entre réalisme et fantastique ou plutôt merveilleux.
Le héros du roman vit perché dans un arbre et ce à partir de la révolution française jusqu’à la Restauration… La situation grotesque rend illusoire tout crédit apporté à l’histoire. Ce qui compte, ce sont les pensées intérieures, les allers et retours entre le dit et l’à dire, les reprises, les détours de ce par quoi s’opèrent des décisions de vie. L’écriture de Calvino est fondamentalement mobile comme le disait son éditeur au Seuil, François Wahl. La biographie de Côme Laverse du Rondeau est racontée par son frère. Ce narrateur a donc vécu les faits. Il écrit : « Ce que je vais raconter, comme bien d’autres parties de ce récit, m’a été rapporté par Côme lui-même, plus tard, ou bien je l’ai tiré moi-même de témoignages dispersés et d’inductions personnelles » (p.29).
Situé entre 1767 (date où Côme Laverse du Rondeau décide de ne plus vivre que dans les arbres) et 1815 (soit, approximativement, peu après la mort du héros), le roman est une exploration des lumières italiennes et en même temps un récit historique : avec la proclamation de la république ligurienne à Gêne en 1797, la soumission de l’Italie à Napoléon 1er, l’occupation du royaume de Naples (1806/1808)…
Plus que roman historique, Le Baron perché est une réflexion sur l’exil et son corollaire, la révolte. L’arbre représente l’éloignement géographique et en même temps, une vie recommencée au plus près de la nature. Côme se fait presque oiseau, accentuant ainsi la distance avec la société humaine vue de loin, de haut, donc vue aussi d’un œil véritablement objectif. Même si toutes les histoires, « de vraies qu’elles étaient, devenaient imaginaires », ce que le personnage raconte est un juste pont étroit entre le réel et la représentation objective recherchée pour le maîtriser… Et ce à l’image de l’univers arboricole du roman : « Le monde désormais s’était transformé : il était fait de ponts étroits et incurvés tendus dans le vide, d’écorces où nœuds, écailles et rides semaient leurs rugosités ; il baignait dans une lumière verte qui changeait avec l’épaisseur et la consistance du rideau de feuilles ».
Ainsi, par la poésie, Calvino renoue-t-il avec le conte philosophique voltairien, et ce n’est pas un hasard si Voltaire est convoqué dans l’histoire elle-même de la fiction.
Philippe Geneste
(1) Voir l’excellent article de Nathaniel Herzberg, « Tempête autour de Calvino », Le Monde 12 janvier 2013
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Fournier, Alain, Le Grand Meaulnes, notes et carnet de lecture par Jean-Noël Leblanc, Gallimard, collection folio junior, 2016, 333 p. 4€60
On le sait, le réalisme merveilleux est une marque de la crise du roman du tournant du XIXème au XXème siècle. Le récit tend à s’effacer au profit de la poésie, de l’étude psychologique ou de l’autobiographie qui viennent tarauder le réalisme dans le patron duquel est dépeint l’univers provincial de la campagne et de la vie du village solognot. Dans le style d’Alain Fournier, de son vrai nom Henri-Alban Fournier (1886-1914), on sent l’influence de Margueritte Audoux. Il déborde cette influence en y apportant une liaison nouvelle entre rêve et réalisme, entre féerie des aventures des personnages et précision des décors, entre besoin d’irréel et description rigoureuse des réalités psychologiques des adolescents. .
Le propre des chefs d’œuvre est peut-être de ne pouvoir pas être réduit à un commentaire biographique. Dépassés ici les élans mystiques de Fournier, dépassées les explications psychologiques par la vie sentimentale de l’auteur, dépassé le conformisme idéologique d’Henri Fournier : le style, l’univers créé sont une même offrande au lecteur, offrande renouvelée à chaque nouvelle lecture, offrande pour aller puiser, dans un voyage intérieur, les ressources de sa propre vie face au monde environnant. Que le roman soit paru en pleine crise du roman lui confère une fonction d’illustration des tensions entre vie réelle et onirisme, entre aventure objective et rêve intérieur de vie. Le Grand Meaulnes y répond par un équilibre fragile bien que permanent, où les repères temporels se brouillent autant que les personnages s’égarent dans leurs cheminements respectifs.
N’est-ce pas à cette jointure des opposés, à ce carrefour des contradictoires traitements de l’intrigue, que se trouve, justement, un point d’intemporalité du roman, c’est-à-dire cet espace où l’intériorité reconstructrice de la vie et l’extériorité contraignante du parcours personnel trouvent un havre de paix : éphéméréité d’une construction du réel et pourtant profondément irréelle ? Nous avons parlé d’intemporalité, mais peut-être devrions-nous évoquer une transfiguration de la vie, nécessaire à la vie même.

Philippe Geneste

19/03/2017

L’histoire en planches

Cuvillier Damien, Galic Bertrand, Kris, Nuit noire sur Brest, Futuropolis, 2016, 80 p. 16€
Le 29 août 1937, un sous-marin républicain espagnol entre en rade de Brest, le temps d’une réparation… Mais les autorités françaises ne voient pas d’un bon œil cette intrusion de la guerre d’Espagne sur son territoire et refuse d’assister l’équipage. En même temps, Troncoso, un franquiste aux dents longues, organise un commando pour s’emparer du navire. Au sein de l’équipage, se côtoient des communistes, des anarchistes et des marins sans conviction politique déclarée. La bande dessinée, sur un scénario efficace, fait revivre cette péripétie de la guerre d’Espagne. Une longue postface de Patrick Gourlay met en perspective le récit, jette un éclairage d’érudition sur les protagonistes. Il montre les relais français du franquisme, notamment la Cagoule, le rôle ambivalent du gouvernement de front populaire au moment du procès de Troncoso en 1938.
Cet ouvrage est à acquérir par tous les centres de documentation et d’information, par toutes les bibliothèques ouvertes à la jeunesse. La maîtrise du scénario, et la maîtrise du dessin et des couleurs en font un livre instructif par le divertissement.

Angux, Avery’s blues, dessin Tamarit, traduit de l’espagnol Amaia Garmendia, Steinkis, 2016, 80 p. 17€
Cette bande dessinée s’inspire du mythe de Robert Johnson (1909-1938) pour raconter l’histoire de deux jeunes bluesmen en quête de la meilleure musicalité instrumentale guitaristique. Les dessins offrent des silhouettes vagues, tendant à l’informe, au milieu de décors et paysages en ocre, marron, couleur terre brûlée, soleil brûlant, nuits et crépuscules d’ombres et d’obscurité envahissantes. Robert Johnson fut longtemps le bluesman sans visage, aux noms multiples d’une « ascendance obscure » (1), au jeu singulier et torturé, aux chants tourmentés, mort de manière mystérieuse, et dont les idolâtres sont convaincus qu’il signa un pacte avec le diable, ce dont attesterait sa chanson Crossroads (« je suis allé au carrefour, je suis tombé à genoux et j’ai imploré Dieu d’avoir pitié et de sauver ce pauvre Bob ») ou Hellhound on my trail (ces chiens de garde de l’enfer qui le poursuivent).
La bande dessinée revisite le mythe d’assez près. Steven Johnson, son petit fils, rapporte ainsi qu’en « 1930 Robert a quitté le Delta pour revenir à Hazlehurst, sa ville natale. Alors qu’il cherchait son père, il a rencontré un bluesman, Ike Zinnemon, et il a commencé à le suivre partout où il allait (…) Ike a fini par le considérer comme son frère. Tous deux ont joué dans plusieurs juke joints et ont même un peu tourné dans les environs, le tout pendant quelque deux ans. A son retour dans le Delta, Robert jouait magnifiquement bien de la guitare alors qu’il n’était à priori pas doué, et les autres artistes lui demandaient comment il avait fait, s’il n’avait pas vendu son âme au diable » (2). C’est quasi le scénario du récit d’Angux et Tamarit. Il faut ajouter à cette proximité biographique, le périple de 1920 où Robert Leroy Dodds Spencer (sa mère ayant pris un nouveau mari) « retourne vivre dans le Delta autour de Robinsonville, sur la plantation Abbay & Leatherman, il sait déjà jouer de la guitare » (3), ce qui est à peu près le trajet des deux bluesmen de la BD. Les époques sont juste mises en collusion pour parfaire l’univers fantastique que le dessin installe avec rudesse.
L’intelligence du scénario est d’amener le trouble, chez le lecteur, sur le héros du récit : est-ce Avery, que l’on suit depuis le début et qui a fait un pacte avec le diable, dans le dessein de mieux jouer ? Est-ce Johnny, le pauvre gosse du voisinage maltraité par ses parents ? En fait la fin seule nous fait comprendre que c’est plutôt Johnny. Avery son initiateur ou plutôt son initiatrice à la musique, car en fait, sous une dégaine de garçon, Avery est une fille qui a fui la condition d’exploitée des femmes noires. Dans cette atmosphère étrange où domine l’ambiguïté, on voit le diable jouer avec les deux personnages pour les corrompre. Avery mourra au carrefour, Johnny triomphera dans les fêtes, les bars et les juke joints. Sous le regard satisfait du malin, Johnny poursuit sa route jusqu’au jour où il paiera son dû au Démon, car lui aussi, laisse entendre l’histoire de retour au mythe, sera « appelé par une force “diabolique” vers le croisement des routes du Delta » (4).
Cette thématique est issue, dit Gérard Herzahft, d’une superstition d’origine irlandaise « où le diable se tapissait au croisement des chemins achetant l’âme des fiddlers en leur donnant un talent “diabolique” était courante dans le sud des Etats-Unis » (5). Le livre vaut ainsi pour sa dimension culturelle autant que pour sa description historique d’un phénomène musical aux racines sociales exacerbées.
Philippe Geneste

(1) Gérard Herzaft, « Robert Johnson superstar de l’outre-tombe », Soul Bag n°2013, juillet-août-septembre 2011, pp.18/23 / p.18 – (2) propos recueillis par Daniel Léon , « Johnson on my trail », Soul Bag n°2013, juillet-août-septembre 2011, pp.28/30 / p.30 – (3) Gérard Herzaft, « Robert Johnson superstar de l’outre-tombe », Soul Bag n°2013, juillet-août-septembre 2011, pp.18/23 / p.20 – (4) Gérard Herzaft, « Robert Johnson superstar de l’outre-tombe », Soul Bag n°2013, juillet-août-septembre 2011, pp.18/23 / p.20 – (5) Gérard Herzaft, « Robert Johnson superstar de l’outre-tombe », Soul Bag n°2013, juillet-août-septembre 2011, pp.18/23 / p.21

12/03/2017

Jeu polytechnique des formes plastiques pour questions imaginaires

herbauts Anne, L’Arbre merveilleux, Casterman, 2016, 48 p. 14€90
Voici la réédition d’une des œuvres majeures d’Anne Herbauts, cette créatrice belge née à Uccle en 1976. La cafetière qui illustre la couverture est à l’autrice ce que le flying tea pot est à Daevid Allen, poète mythologue de Gong. Dans cet univers, le jeu tient une place primordiale, tout est jeu, à commencer l’écriture. Il s’agit d’un jeu polytechnique des formes plastiques (peinture, découpage, collage, mise en page, dessin) qui crée des solutions à des questions imaginaires suggérées ou posées par l’illustration. L’histoire se déroule dans un climat farfelu, porté par un déterminisme non causal de péripéties. Un arbre merveilleux d’où pendent cinq objets énigmatiques, tel est le décor. Mais un décor ne suffit pas, il y faut un moment déclencheur et ce moment est celui d’une rencontre –la vie est-elle faite d’autres choses que de rencontres ?- : celle d’un diablotin, Garagargouille et d’un monsieur rangé, monsieur Comme-Toujours. Un passage chez une sorcière, qui détient le fil de l’histoire, et voilà l’intrigue lancée : le diablotin, Faust tentateur vole le fil de l’histoire et Comme-Toujours sort de sa routine par curiosité toute humaine… Les actes des deux héros alimentent en énergie l’histoire qui est une gageure de plaisirs et de faits saugrenus qui se tissent en un récit fiévreux où musique, tristesse, temps, heur, sériosité réflexive et impertinence se croisent. Nous sommes dans le merveilleux poétique qui poursuit la quête surréaliste du monde comme il va.
L’album abonde en clins d’œil à d’autres textes : l’intertexte où surviennent les frères Grimm, Perrault, Lewis Carroll, Daudet y est une source de joie supplémentaire et renforce l’ancrage dans le merveilleux. La définition de la lecture s’enrichit, aussi, car lire c’est s’élever à l’incompréhensible, grandir pour admettre l’idée que l’homme vaut par ce que ses actes signifient (1). En fait les causes sur lesquelles s’enchaînent les péripéties défient la causalité physique comme la causalité logique. Voilà pourquoi nous parlons de déterminisme non causal. Certes, ceci est paradoxal ; peut-être devrions-nous parler d’une causalité de vraisemblance qui structure l’étrangeté. Au fond, c’est élever le discours au rang de créateur de réel, c’est-à-dire, au fond, juste, reconnaître la réalité de l’imaginaire, des représentations portées par leurs expression iconiques ou verbales (2).
A la fin, la sorcière reprend le fil qu’elle s’était laissée dérobée pour mettre en conserve une nouvelle histoire avant de pousser dehors Garagargouille et Comme-Toujours. La sorcière est la faiseuse d’histoire, figure de l’autrice, peut-être, définissant la lecture par l’immoralisme d’un voyeurisme truculent. L’album approche l’enfantin : « C’est ce qui fait la richesse de cette “identité humaine sans raison” qui, toujours préoccupée par ce qu’elle n’est pas, s’invente des raisons d’être » (3). Et dans ce geste, l’album ouvre à une prise de conscience du réel par la réalisation des rêves, des fantasmes. Le déroulement du fil de l’histoire au gré de l’humour fantasque valorise l’enfantin car il fait l’éloge de « l’innocence au sens d’indifférence pure aux normes et valeurs » (4).
Philippe Geneste
(1) n’est-ce pas un souffle du surréalisme que cet incompréhensible que « l’homme ne contient pas, mais signifie » comme disait Ferdinand Alquié, Philosophie du surréalisme, Paris, Flammarion, collection Champs, 1977, 186 p. – p.169
(2)Sur cette question de la représentation, voir le blog lesart psychomecanique où plusieurs études traitent de la représentation verbale.
(3) L’enfantin est un concept forgé par Pierre Péju. La citation est extraite de son livre Pourquoi je suis moi ? et autres questions d’enfance, dessins de Sandrine Martin, Gallimard, 2014, 95 p. 11€. Sur le concept d’enfantin, on lire avec grand profit l’ouvrage majeur, Enfance obscure, collection Haute Enfance, Gallimard, 2011, 375 p.
(4) Péju Pierre (textes réunis et présentés par), Le Goût de l’enfance, Paris, Le Mercure de France, 2014, 108 p. 7€ - p.95

05/03/2017

On ne se réfugie pas dans l’exil

Sanna Francesca, Partir, au-delà des frontières, Gallimard Jeunesse, 2016, 48 p. 15€90
L’album se fait récit documentaire par le truchement de la poésie visuelle et d’un style elliptique qui suggère les choses pour mieux faire ressentir les émotions humaines sous-jacentes à l’exil. Ici, rien de larmoyant. Une guerre survient, et comme dans toute guerre, qu’elle se dise humanitaire, qu’elle se dise pour la démocratie, qu’elle se dise contre la barbarie, l’humanité sombre dans la douleur et le chaos des sentiments. La mort impose sa vision destructrice. La violence triomphe et avec elle la haine.
La guerre chasse deux enfants et leur mère de leur lieu de vie. L’album raconte leur périple, il raconte les frontières à franchir, il raconte le nationalisme, il raconte l’étrécissement des humains en proie à la volonté guerrière. Que reste-t-il au déraciné ? Il délaisse son lieu, son appartement ou sa maison, ses amis, son mode de vie ; il lui reste alors la rage de vivre c’est-à-dire le lien social à nouer, à créer. Il possède ses pas, mais pas même leur direction.
Entre surréalisme et minimalisme, jouant du flou et du détail proliférant, brisant les échelles du dessin, la sensibilité de l’illustratrice métamorphose l’album en conte d’actualité. Et ce conte est un conte sans morale afin que le jeune lectorat trouve par lui-même une interprétation à donner au monde comme il va.
Jean Didier et Zad, Paris-Paradis, troisième partie, illustrations de Bénédicte Némo, Utopique, 2016, 38 p. 15€50
Ce bel album poursuit les aventures de Moussa, qui a quitté son pays d’Afrique (tome 1), a vaincu les obstacles de l’émigration (tome 2) et se retrouve à Paris. Le rêve n’est pas au rendez-vous. Moussa constate la réalité des conditions de vie des travailleurs immigrés privés de papiers. Et c’est avec eux qu’il accomplit son apprentissage de la vie. Les peintures de Bénédicte Némo, jouant des gros plans et des avant-plans, mettent le lectorat au cœur du récit. Aucun plan général, des plans moyens et des plans rapprochés structurent les espaces graphiques. Très bien documenté, l’album instruit sur la condition immigrée dans la France contemporaine. Les événements sont ponctués de proverbes et dictons africains, aphorismes métaphoriques qui poussent les jeunes lecteurs à la réflexion. Un album qui, espérons-le, trouvera sa place dans les bibliothèques scolaires et les centres de documentation des collèges.
Philippe Geneste

Tixier, Jean-Christophe, La Traversée, Rageot, 2015, 159 p. 9€50
Le personnage est un adolescent africain de 17 ans. Il part de chez lui pour rejoindre l’Europe dans l’espoir d’y trouver du travail et une vie sans misère. Le récit alterne narration du naufrage de l’embarcation sur la Méditerranée et narration rétrospective de la vie au village ; C’est l’occasion pour l’auteur de raconter les modes de vie d’une autre civilisation.
Dufresne Didier, La Mercedes rouge, oskar, 2016, 80 p. 10€95
Un roman sur l’immigration turque en Europe. Un fils qui, comme son père va travailler en usine, en France. C’est un livre sur ces travailleurs immigrés qui habitent en France et sont français. C’est un livre contre l’exclusion et qui fait réfléchir sur la relativité de l’identité nationale. Un livre simple à lire.
Commission lisezjeunesse

Kimura Ken, 999 Têtards, illustrateur Yasunari Murakami, Casterman, 2016, 32 p., 14€95
Voici un album qui épouse la logique du road movie naturaliste. On suit les péripéties des petits de deux grenouilles, depuis leurs naissance jusqu’à leur installation en une nouvelle mare. C’est d’abord l’album humoristique de ces improbables petits êtres soumis aux convoitises de prédateurs multiples. Et puis, c’est un peu plus que cela. Au bénéfice de l’anthropocentrisme de l’album, c’est une réflexion sur l’itinérance et la migration que proposent les deux auteurs. A l’instar des multiplications des points de vue de Murakami, le récit de formation des petits est récit de formation pour le tout jeune lectorat. Qu’est-ce que vivre chez soi ? Qu’est-ce que c’est, chez soi ? Il faut prendre de la hauteur nous dit l’album afin de comprendre le monde. L’humain peut le faire, l’animal est condamné à le subir. Un album autant profond que drôle et donc ouvert à toutes les lectures qui s’y inviteraient.


Philippe Geneste